Suite à la publication de l’avis d’enquête public, le groupe Europe Écologie les Verts à la Métropole et EELV Auvergne ont souhaité marquer leur opposition à ce projet d’implantation sur les terres fertiles de la Plaine de Sarliève
Un projet en contradiction avec l’ambition de relocalisation de notre alimentation
La plaine de Sarliève qui se situe sur les terres riches de la Limagne possède de très grandes qualités agronomiques, sans besoin d’équipements d’irrigation en raison d’une forte présence d’eau de faible profondeur et jouit d’une situation idéale à proximité immédiate de la métropole clermontoise qui a d’important besoins alimentaires.
Afin d’éviter le transport de denrées alimentaires qui pourraient tout à fait être produites au sein de la Métropole, permettant ainsi de réduire l’emprunte carbone de notre approvisionnement tout en le sécurisant, il devient indispensable de développer la production agricole en circuit-court. En effet, la surface agricole actuellement utilisée sur la Métropole permet de produire uniquement 2% des besoins totaux de la population. Sans parler d’une totale autosuffisance alimentaire, il nous paraît réaliste et important d’atteindre un objectif de 20 % dans les dix prochaines années.
Le projet de création d’une ceinture verte autour de la Métropole vient confirmer cette ambition. Le soutien de la Ville de Cournon d’Auvergne et de Clermont Auvergne Métropole au projet Ferme de Sarliève, voisine du projet Urban Village, est là aussi marqueur de cette volonté politique d’accompagner le développement des circuits-courts et de l’agriculture biologique. Dans sa réponse apportée à l’Autorité Environnementale, le porteur de projet mentionne que le maraîchage classique n’est « pas pertinent sur une zone comme la Plaine de Sarliève ». Bien que les terres lourdes de la plaine compliquent la culture maraîchère, elles ne l’empêchent pas fondamentalement. De plus, le maintien d’une exploitation céréalière diversifiée, dont les besoins pour notre autosuffisance alimentaire sont importants, fait aussi partie des solutions.
Outre cette question d’indépendance alimentaire au cœur du programme politique de la Métropole, le projet Urban Village nous apparaît complètement déconnecté des enjeux économiques et environnementaux des temps actuels.
Une incompatibilité avec le Pôle de Développement Stratégique
Le projet Urban Village ne nous semble absolument pas revêtir un caractère stratégique pour notre Métropole, condition pourtant indispensable pour l’installation d’un projet sur un secteur classé « Pôle de Développement Stratégique » (PDS) dans le SCOT du Grand Clermont. Comme défini dans ce document, « les PDS doivent conforter le caractère industriel ou logistique de la métropole ou renforcer les activités technologiques, les équipements et les services d’échelle métropolitaine qui, du fait de la nature de leur activité ou de leur emprise foncière, ne peuvent s’implanter au sein du tissu urbain ». De plus, il est prévu en phase 2 et 3 du projet la construction de commerces, qui sont normalement exclus d’un PDS.
Tout d’abord, ce projet ne paraît pas conforter ni le caractère industriel, ni le caractère logistique, ni renforcer des activités technologiques de la Métropole ; par contre, il propose sur un même lieu le regroupement de plusieurs équipements déjà présents sur le tissu urbain du territoire métropolitain. En effet, les activités proposées par Urban Village, c’est-à-dire une multitude d’activités sportives, sont déjà représentées au sein même de la Métropole, d’ailleurs pour certaines, implantées dans le tissu urbain : padel, futsal, escape game, escalade ou encore petits commerces. Plutôt que de concentrer des activités sportives dans un lieu éloigné d’habitation, tel que le projet Urban Village le propose, il nous paraît alors plus pertinent de mailler le territoire d’infrastructures sportives de proximité dans le tissu urbain, par exemple dans le cadre de reconversion de friches industrielles comme il peut y en avoir sur l’axe entre Cournon et le Cendre. In fine, le maintien d’une exploitation agricole en lieu et place de ce projet nous semble bien plus stratégique quant aux besoins de notre Métropole.
Un projet démesuré en concurrence avec les structures installées
Ces nouvelles infrastructures pourraient être à terme créateur d’emplois, mais il nous faut rester vigilant à ce qu’elles ne détruisent pas de l’emploi au sein des autres structures de même type qui se sont développées au fil des années sur notre territoire. Exemple en est l’implantation du magasin Ikea : le principal argument des promoteurs était la création d’emplois sur le bassin clermontois, mais son ouverture a probablement exercé une influence sur la fermeture de plusieurs autres magasins d’ameublement.
De plus, nous nous questionnons sur la rentabilité d’un tel projet aux vues de sa démesure. Celui-ci en ferait le plus grand Urban Village de France, avec une prévision de plus d’1 million de visiteurs (par an ?) alors qu’au début du projet le nombre de 500 000 visiteurs (par an ?) était évoqué.
Le porteur de projet argue d’une absence de terrain permettant l’implantation d’un tel projet sur la Métropole, ce qui est dû à leur choix tant sur l’ampleur du projet que sur sa concentration en unique endroit. Pourtant, regrouper une multitude d’activités sur le même site comporte divers inconvénients sans être gage d’augmentation des pratiques sportives, les utilisateurs de ce type d’infrastructures ne venant que rarement pratiquer plusieurs sports sur une même journée. Utiliser l’argument de l’attractivité du territoire pour justifier de la démesure d’un tel projet ressemble plus à une prophétie qu’à une argumentation rationnelle. Par ailleurs, les zones d’activités d’Aubière et de la Pardieu regroupent d’ores et déjà plusieurs activités similaires à ce qui est proposé par Urban Village (basket en salle, foot en salle, restauration…), notre territoire est donc bien « attractif » pour ces habitants et, plutôt que de l’être aussi pour des habitants d’autres territoires, mieux vaudrait travailler à doter aussi ces territoires d’infrastructures sportives leur permettant aussi d’être « attractif » pour leurs habitants.
Une atteinte à l’ambition d’une zéro artificialisation nette
Bien que le projet Urban Village mette en avant sur son site le respect de l’environnement et de l’intégration paysagère (notamment sur les choix architecturaux, l’implantation de haies et d’arbres et le maintien d’un projet en agriculture biologique sur les terrains en zone inondable), ses aménagements vont entraîner l’artificialisation d’une superficie d’environ 10 ha, de « terrains instables » selon l’étude portée par le porteur de projet « en raison de présence d’eau en faible profondeur (1m – 1,2 m ) », donc peu propice à l’urbanisation. De plus, ces 10 ha de terres sont déjà engagées dans une démarche agricole environnementalement vertueuse, l’exploitant actuel étant en conversion vers l’agriculture biologique (est-on sûr de cette info ?).
Ces terres riches, comme mentionné en début d’avis, sont immédiatement contiguës au tissu urbain existant de notre Métropole : elles en matérialisent la limite que nous devrions désormais préserver pour que notre Métropole cesse d’artificialiser des sols pour s’étendre, à commencer par ceux de terres fertiles comme la plaine de Sarliève. Sans cela, comment alors respecter l’objectif de zéro artificialisation nette intégré dans la loi Climat, quand on constate que notre Métropole a artificialisé plus de 700 ha au cours des 10 dernières années. Pour rappel, cette loi ambitionne de réduire le rythme d’artificialisation des espaces naturels, agricoles et forestiers de 50 % à la fin de la décennie. Il nous faut donc dès à présent réfléchir très sérieusement aux finalités pour lesquelles la Métropole viendrait à autoriser l’artificialisation de nouvelles terres, en ne dérogeant qu’à de rares exceptions, pour des raisons stratégiques, notamment d’indépendance, de résilience, etc., ce qui n’est en rien le cas du présent projet. D’ailleurs, l’avis rendu par l’Autorité Environnementale sur le projet est extrêmement perplexe quant au développement d’un complexe de loisir et commercial tant il permettrait « d’amorcer l’urbanisation de ce PDS et de faciliter les phases d’aménagement ultérieures vers le Sud ».
Un projet basé sur l’utilisation de la voiture individuelle
Ce projet repose fortement sur le modèle de la voiture individuelle : en s’implantant au bord de l’autoroute, il rendra l’usage de la voiture bien plus attirant que celui des rares transports en commun passant à proximité. L’hypothétique arrêt de bus, prévu pour 2025 et qui passerait au bord du site, aura bien peu d’impact sur le caractère « aimant à voitures » du projet car très peu d’habitants de sa vaste zone de la chalandise auront accès aux transports en commun desservant le site. En l’état actuel des choses, l’accès par le train, via la gare SNCF à proximité, devrait être grandement amélioré pour devenir un moyen de transport crédible pour se rendre sur place.
Ainsi, en augmentant encore le recours à la mobilité automobile, ce projet ne pourra qu’augmenter les émissions de gaz à effet de serre, venant en contradiction avec les objectifs communs, français et internationaux, de réduction de notre impact sur le changement climatique, objectifs rappelés localement dans le PCAET et le PDU de la Métropole.
Un impact négatif sur les paysages
Alors que le Grand Clermont travaille actuellement sur un plan de paysage pour valoriser l’entrée sud de la Métropole, il nous apparaît contre-productif de construire un complexe sportif aussi grand sur des terrains agricoles qui viennent justement améliorer des paysages déjà fortement défigurés par plus de 50 années d’urbanisation anarchique. Il est nécessaire de travailler à la valorisation de notre patrimoine géologique, historique et archéologique sur ce territoire : d’ailleurs, le centre régional Auvergne Rhône Alpes de l’information géographique souligne la richesse archéologique de la Plaine de Sarliève, à travers notamment la proximité du grand camp de César et tout proche de l’oppidum de Gondole. Un projet de site classé, dont les limites sont au niveau de la Plaine de Sarliève, est en cours d’élaboration. Il nous paraît donc d’autant plus important de valoriser le paysage à cet endroit qui pourrait avoir de nombreux atouts pour la promotion touristique du territoire.
La démarche entreprise par le projet Ferme de Sarliève visant à planter diverses haies sur la plaine, nous semble bien plus adapté à l’objectif de valorisation du porté par les élu.e.s locaux du Grand Clermont.
Une atteinte à la biodiversité
La LPO, dans le cadre du travail actuellement mené sur la Ferme de Sarliève, a mené des campagnes d’observation d’oiseaux sur la Plaine de Sarliève, avec des résultats particulièrement intéressants pour la Rousserolle effarvatte et le Bruant des Roseaux. Le projet Urban Village viendrait menacer l’implantation de ces oiseaux dont la population, notamment pour le Bruant, est en baisse drastique dans notre région. De plus, le travail d’analyse réalisé par le bureau d’études pour le compte d’Urban Village nous apparaît très réducteur, notamment du fait d’une période d’observation sur place particulièrement courte.
Favoriser l’accès au sport pour toutes et tous n’est pas le créneau d’Urban Village
Urban Village revendique agir pour la promotion du sport santé. Certes, cette activité donnera un accès supplémentaire au sport, mais en s’orientant seulement vers une partie de la population. En effet, le coût non négligeable de ces activités réduit la cible de potentiels utilisateurs des infrastructures, tout en rentrant en concurrence directe avec les structures associatives, les fragilisant en attirant les personnes ayant le plus de moyens, au détriment de la pérennité de ces structures associatives accueillant tous les publics, y compris les plus précaires. Les infrastructures de proximité portées par la Métropole et par ses communes, accessibles aux acteurs associatifs, permettent de mieux répondre à l’objectif d’accès au sport Dans une optique de développement du sport santé, certaines communes, dont Clermont-Ferrand, propose même certains créneaux d’accès aux équipements sportifs en dehors des créneaux associatifs. Des infrastructures gratuites et accessibles à toutes et tous comme le complexe Philippe Marcombes répondent finalement bien mieux à cette ambition de promotion du sport-santé pour toutes et tous qu’un complexe Urban Village éloignée de la zone urbaine et orientée vers les personnes les plus aisés.
En conclusion, nous estimons que ce projet présente de forts impacts négatifs pour notre territoire sans répondre à des enjeux d’intérêt général, et nous proposons donc son abandon en l’état. A minima, il doit être déconcentré et réparti sur plusieurs sites dans des zones déjà urbanisées, par exemple dans des pôles commerciaux ou sur des terrains de reconversion de friche industrielle.
Le groupe Europe Écologie les Verts Clermont Auvergne Métropole
Europe Écologie les Verts Auvergne